Rencontrer un correcteur est un événement aussi rare qu’une éclipse de soleil : non seulement c’est une espèce en voie de disparition, mais en plus, le correcteur est un loup solitaire qui sort rarement de son liteau.

Il fut un temps où l’on pouvait encore en trouver dans les cassetins, mais cette époque est presque révolue, l’évolution de la loi les ayant relégués à domicile avec un statut de TAD ou d’entrepreneur individuel.

À ce stade, il faut quand même que je définisse le mot « cassetin ». C’est le nom donné au bureau des correcteurs dans la presse (la casse étant la boîte en bois dans laquelle étaient rangés les caractères d’imprimerie).

Cela étant dit, si par le plus grand des hasards vous croisiez un, voire deux correcteurs, vous les reconnaîtriez en les entendant palabrer.

En effet, quand deux correcteurs discutent, ils sont les seuls à se comprendre.

 

Brève n°1 :

« C’est comment, la Maison Blanche ?

– Deux caps sans div !

– Et le Saint-Siège ?

– Deux caps div ! »

 

Si vous regardez bien comment sont écrits les mots, vous pouvez deviner que « caps » = capitales (majuscules) et que « div » est l’abréviation de « division », le nom donné au trait d’union.

Donc, deux caps sans div = deux majuscules sans trait d’union, et deux caps div = deux majuscules et un trait d’union.

 

Brève n°2 :

« Les noms de bateaux, c’est ital. ou rom. ?

– Ital. ! »

Ital.= italique

Rom.= romain

 

On écrit en effet les noms propres de bateaux en italique : le Clémenceau, le France, le Terrible

 

Brève n°3 :

« Les veuves et les orphelines, c’est l’horreur !

– Tu m’étonnes ! »

 

Rassurez-vous, les correcteurs n’ont aucune aversion pour les veuves et les orphelins.

Le nom de « veuve » fait référence à la première ligne d’un paragraphe qui se retrouve seule en bas d’une page (pour un livre) ou d’une colonne d’article (pour un journal). Cela n’étant pas esthétique, les règles typographiques imposent au moins deux lignes.

De même, on appelle « orpheline » la dernière ligne de fin de paragraphe qui est seule en tête de page (pour un livre) ou en haut d’une colonne d’article (pour un journal). Là encore, les règles typographiques demandent au moins deux lignes.

 

Vous pourrez aussi les entendre parler de marche (décisions typographiques prises par un journal), de corps (dimension de la police), clam (point d’exclamation), flex (accent circonflexe), cadratin ou demi cadratin (petit ou grand tiret dans les dialogues notamment).

Sans oublier les casses (majuscules), bas de casse (les minuscules qui étaient rangées dans le bas de la casse).

Et dans le vocabulaire des typographes, on dit une espace (espace se référant aussi bien à un caractère qu’à une lettre) !

Voilà, vous en savez en peu plus sur cette espèce bizarre nommée correcteur !

 

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